Yevhenia maman de Nikita
Au-delà des barrières « ordinaires » peuvent s’ajouter les barrières dues à la guerre, à l’exil, …
Nous sommes une famille ukrainienne et mon fils Nikita, âgé de 10 ans, est atteint d’une myopathie de Duchenne. Au début de la guerre, en mars 2022, nous avons dû quitter notre maison avec mes deux fils, en laissant mon mari engagé dans la guerre.
Lorsque nous avons quitté l’Ukraine, Nikita pouvait encore marcher un peu et se tenait bien debout. En chemin, il a complètement cessé de marcher et ses jambes ont commencé à se déformer. Aujourd’hui, il ne peut plus se tenir debout.
A St Brieuc, nous avons trouvé un vieux fauteuil roulant pour adultes, et nous l’avons adapté pour Nikita nous-mêmes (il l’aimait beaucoup). Nous avons vécu pendant un certain temps en appartement chez ma sœur qui vivait déjà en France depuis de longues années, avant de chercher un autre logement indépendant qui conviendrait à notre fils. Il nous a fallu six mois pour trouver un endroit où vivre afin d’être autonome. Nikita n’avait plus de médicaments, nous sommes donc allés voir le médecin de famille de ma sœur. Nous avons eu la chance que ce médecin nous aide à prendre contact avec le centre médical spécialisé « Helio Marіn » à Plerin en Bretagne, qui se trouve être dans la ville mitoyenne de celle où nous vivons.
Depuis mai 2022, Nikita a des séances de kinésithérapie, de piscine, 3 fois par semaine. Les documents officiels requis ont été établis en novembre 2022. Depuis, nous sommes à la recherche d’une école, mais nous ne trouvons toujours pas d’auxiliaire de vie scolaire pour Nikita, afin de l’aider dans sa scolarité ainsi qu’un établissement avec les aménagements adaptés pour un enfant handicapé en fauteuil roulant. C’est une situation extrêmement frustrante pour lui car il manque sévèrement de socialisation et de communication.
Jusqu’à l’âge de 9 ans, il avait une vie normale en Ukraine – école, professeurs et un grand cercle d’amis. Il allait dans une classe normale, faisait ses propres devoirs comme n’importe quel enfant autonome, participait aux événements scolaires, chantait, dansait, il étudiait donc avec tous les enfants du même niveau scolaire que lui. Maintenant, c’est très difficile pour Nikita parce qu’il ne connaît pas le français et que personne ne le comprend. Il ne peut pas l’apprendre parce qu’il n’a pas de professeur et que notre situation et les soins lui laissent trop peu de temps pour étudier.
Tout va bien en ce qui concerne les soins médicaux. Une fois par an, nous allons voir tous les spécialistes et nous passons tous les tests adaptés à sa pathologie.
En un an et demi, mon fils a pris 15 kilos, et nous avons changé son traitement de corticoïdes de Prednisone à Deflazacort. Nikita va l’essayer pendant 3 mois.
En mai 2023, nous avons dû rentrer en Ukraine pour 2 semaines. Nous avons voyagé en bus pendant 56 heures (nous avons demandé un siège près de la sortie pour ne pas avoir à le porter partout dans le bus). Aux arrêts du bus, nous ne pouvions pas sortir le fauteuil roulant du coffre et j’ai dû porter Nikita dans mes bras afin de le déplacer pour se nourrir et avoir accès aux commodités.
Au retour, nous avons pris le train, puis l’avion jusqu’à Paris. Tout s’est bien passé, on a mis à notre disposition des personnes pour nous aider à l’atterrissage.
A Plérin où nous vivons maintenant, Nikita n’a pas encore trouvé ce qu’il pourrait faire comme activité extra-scolaire, car nous ne savons pas où chercher. En Ukraine, il y avait souvent des vacances, des événements pour les enfants, des voyages pour les enfants handicapés. En France, nous n’avons pas encore pu trouver quelque chose de ce genre.
Nikita aime les jeux d’ordinateur, les Lego, les voitures, comme tous les enfants ordinaires, et il est très inquiet de ne pas pouvoir communiquer avec les enfants, de n’avoir presque pas d’amis. Il n’a personne avec qui se promener. Comme nous vivons près de la mer, il veut y passer plus de temps, mais ce n’est possible que sur certaines plages, car son fauteuil roulant ne passe pas sur le sable.
Il veut aller à Disneyland et voyager beaucoup. Et son rêve le plus cher est de marcher à nouveau.